No°6 – Après 04 : Ma Place dans ta vie

Attention ! Présence d’un lemon dans ce chapitre !

No°6 – Après
Chapitre 04 : Ma Place dans ta vie

Il pleuvait des cordes cette nuit-là. Les rues d’Utopia étaient désertes et la silhouette titubante du jeune homme était bien la seule depuis des heures à passer par là.
Il était complètement ivre. Ses cheveux bruns aux étranges reflets bleutés dégoulinaient de pluie, mais il était impossible de savoir si son visage, lui, ruisselait à cause d’elle ou de ses larmes.
Larmes de rage ou de peine… Il ne le savait plus. L’alcool nageait dans sa tête et il ne savait pas où il était, l’heure, ni plus rien, à part qu’il avait envie de tout détruire, à commencer par lui-même, à commencer par celui qu’il haïssait ce soir-là autant qu’il l’avait aimé.
Il donna un grand coup de pied dans une poubelle en hurlant :
« CONNARD T’AVAIS PAS LE DROIT DE ME DIRE ÇA !!!! »
Le choc lui fit perdre le peu d’équilibre qui le lui restait et il s’écroula dans les flaques.
« … T’avais pas le droit… »
Il sanglota.
« …Je te déteste… »
Une porte s’ouvrit derrière lui et une voix de femme s’écria :
« Mais qu’est-ce que vous faites là !… Il faut vous mettre à l’abri… »
Qu’est-ce que je fais là…
Comment ça a pu arriver…
Shion, qu’est-ce qui s’est passé ?…

*********

Hôpital Nord, 1er étage, chambre 42, trois semaines plus tôt.

Shion était donc aux toilettes et la porte de la chambre s’ouvrit. Nezumi tourna la tête pour voir une toute petite frimousse pointer son nez. Intrigué, Nezumi pencha la tête pour voir un immense sourire éclairer la petite bouille et un instant plus tard, un petit bonhomme courrait vers le lit en criant :
« Zumiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii !!! »
Nezumi resta bête alors que l’enfant grimpait à toute vitesse sur le lit pour lui sauter au cou :
« Zumi Zumi tu es ‘evenu !!! »
Nezumi fit la moue, puis la lumière se fit enfin dans son esprit fatigué et un sourire naquit sur ses lèvres :
« C’est toi, Haru ?
– Oui !
– Et ben t’as pas oublié de grandir, toi… »
Il ébouriffa la petite tête châtain. Puis il regarda Karan qui arrivait à son tour, un gros sac à la main.
« Enfin réveillé, Nezumi ! dit-elle joyeusement en posant le sac au sol. Comment te sens-tu ?
– Bonjour, Karan. Ça commence à aller mieux, merci. Et v… Et toi, ça va ?
– Très bien !… »
Elle l’embrassa et le serra maternellement dans ses bras :
« Je suis très heureuse de te revoir ! »
Shion ressortit des toilettes :
« Ah, vous voilà… Bonjour. »
Haru bondit du lit en un battement de cils pour courir vers Shion :
« S’ion ! S’ion ! Zumi est ‘evenu ! »
Shion s’accroupit pour prendre l’enfant dans ses bras.
« Oui, mon bébé.
– Tu es content ?
– Oui, je suis très content.
– Tu vas plus pleurer alors ? »
Shion rigola et serra fort son fils dans ses bras. Il vint embraser sa mère puis s’assit au bord du lit, près de Nezumi, l’enfant dans les bras, regardant sa mère qui avait repris le sac et le posait cette fois sur la table :
« Je t’ai apporté tout ce qu’il faut, Shion…
– T’es vraiment une maman parfaite… »
Nezumi passa ses bras autour de Shion et se serra contre son dos :
« File te doucher au lieu de dire des bêtises ! » gronda Karan.
Shion rigola :
« Tu permets que je t’abandonne un quart d’heure, Nezumi ?
– Je pense que je survivrai… Je n’ai pas souvenir d’une belle-mère trop insupportable… »
Ils rirent de bon cœur, puis Shion se leva et mit Haru dans les bras de Nezumi :
« Alors à tout de suite ! »
Le garçon prit des vêtements propres et fila dans la salle de bain de la chambre. Karan s’assit au bord du lit. Haru passa ses petits bras autour du cou de Nezumi et lui fit un gros bisou sur la joue.
« Zumi, je suis content que tu es revenu ! »
Nezumi regarda le garçonnet avec surprise, puis eut un petit sourire :
« Merci, Haru… »
Nezumi se sentait un peu mal à l’aise de cette démonstration d’affection. Karan lui souriait gentiment et dit :
« Tu as bien grandi…
– Il paraît, oui…
– Tu as trouvé ce que tu étais parti chercher ?
– Oui.
– C’est bien. »
Le sourire de Karan s’élargit.
« Shion n’a pas cessé de t’attendre…
– Il n’était pas le seul… »
Haru continuait son câlin et Nezumi soupira :
« Ça a été très long pour moi aussi.
– S’ion il pleurait la nuit des fois… » intervint Haru.
Nezumi soupira encore :
« Ça m’est arrivé aussi… »
Haru le regarda en faisant la moue et lui fit un autre bisou :
« Mais tu es ‘evenu !… Alors vous allez plus pleurer… »
Nezumi serra l’enfant dans ses bras avec un petit sourire, et ce dernier s’exclama soudain :
« Zumi, tu as un dessin sur le bras… »
Nezumi eut un sourire et remonta la manche droite de son pyjama :
« Tu parles de ça ? »
Sur la peau du garçon, entre son épaule et son coude, était tatouée une longue inscription presque totalement illisible. En fait, ça ressemblait plus à un amas de gribouillis au milieu desquels on ne voyait clairement que deux Kanji : celui du vent et celui du protégé, ou du protecteur.
Karan et Haru regardèrent ça avec curiosité et intérêt.
« Qu’est-ce que c’est ? demanda Karan.
– Une vieille prière… »
La porte de la chambre s’ouvrit brusquement sur Yui qui entra en coup de vent, la referma aussitôt et s’appuya contre en rigolant.
Nezumi et Karan échangèrent un regard sceptique en le regardant forcer pour la maintenir fermée, alors que visiblement, quelqu’un tentait de l’ouvrir du dehors. Puis la porte cessa de trembler et Yui, qui rigolait toujours, s’immobilisa, tendant l’oreille, les deux mains toujours sur la poignée et ouvrit grand la porte en se poussant bien.
Adrian s’étala sur le sol.
Yui referma la porte et se pencha, tout sourire :
« Voilà, mon coeur ! »
Karan et Nezumi se regardèrent encore, stupéfaits, puis éclatèrent de rire alors que le grand soldat se relevait en pestant. Haru regardait les deux arrivants avec de grands yeux, puis agita la main en leur souriant :
« Bonjour tonton Yui ! Bonjour tonton Adrian !
– Bonjour, Haru, répondit Yui.
– Vous avez vu, Zumi est ‘evenu ! »
Adrian jeta un regard noir à Yui :
« Toi, attends ce soir et on réglera ça.
– Je t’avais dit que je me vengerais si tu mangeais le dernier toast ce matin. » répliqua Yui en lui tirant la langue.
Le grand borgne s’avança vers le lit en tendant la main à Nezumi :
« Content de te voir enfin réveillé, le rongeur !
– Salut, Freedom, répondit Nezumi en la lui serrant. Ça va ?
– La forme ! Tu te souviens d’Adrian ?
– Oui, oui… »
Le grand soldat s’approcha derrière son ami et serra également la main de Nezumi en lui disant :
« Et ben, tu te seras fait désirer, gamin.
– Fous-lui la paix, Adrian… Bonjour, Karan. Comment va notre future maman ?
– Très bien ! répondit-elle. Le traitement est très efficace, les nausées ont complètement disparu !
– Vous êtes enceinte ? ! sursauta Nezumi avant de se reprendre : Euh, pardon… Tu es… ?
– Oui ! approuva-t-elle joyeusement. C’est tout récent, on le sait depuis avant-hier…
– Ah, c’était ça… soupira le garçon, pensif.
– Quoi ? le relança Karan.
– Euh, bredouilla Nezumi. Rien je vous… Je te trouvais un peu différente… »
Adrian s’assit alors que Yui allait jeter son oeil par la fenêtre.
« Où est Shion ? demanda Adrian.
– Il se douche… répondit Karan. Vous aviez quelque chose à voir avec lui ?
– Adrian, oui, répondit Yui en se retournant vers eux. Moi, je venais juste saluer mon ami rongeur. »
Il continua, tout content :
« Ça me fait vraiment super plaisir de te revoir, toi ! Et entier, en plus !
– Ça me fait plaisir de te revoir aussi, Freedom… Il paraît que tu gères les renseignements ?
– Ouais !
– Avec tes anciens gars ?
– En partie. Zento te donnait le bonjour. »
Nezumi sourit :
« Ah, tu lui rendras… Il va bien ?
– Ouais, ouais… Son efficacité est toujours aussi inversement proportionnelle à la qualité de son humour…
– Toujours un humour de merde, donc, traduisit Nezumi en rigolant.
– C’est ça… »
Shion revint, vêtu d’un jean et d’un T-shirt gris trop large, et s’essuyant la tête avec énergie et une serviette. Il chantonnait.
« Tiens, mes deux fidèles et loyaux subordonnés ! s’exclama-t-il en passant la serviette à son cou. Ça fait plaisir de vous voir, qu’est-ce qui vous amène ?
– Le fidèle et loyal général a à parler à son bien-aimé président, répondit Yui.
– Et le fidèle et loyal responsable des services de renseignements passait juste voir son ami convalescent, ajouta Adrian.
– OK, le bien-aimé président est tout ouïe, général. Que puis-je pour toi ?
– J’ai reçu un appel officieux d’un vieil ami de mon père, diplomate à N°2…
– Sullivan continue à monter son armée ?
– Il a entamé des négociations avec Téhéran à propos d’avions très longue distance… Officiellement pour son aviation civile, bien sûr. »
Shion soupira, un petit sourire las aux lèvres :
« Tellement prévisible que ce n’en est même pas drôle…
– Il y a de fortes chances que le cheikh laisse faire.
– Je vais voir ça avec son fils. Ça peut au moins nous faire gagner du temps. »
Haru câlinait toujours Nezumi qui regardait tour à tour Shion et Adrian. Yui le vit et lui dit :
« On a quelques soucis avec N°2…
– C’est qui, ce Sullivan ? lui demanda Nezumi, sourcils froncés.
– Tu veux la version officielle ou la vraie ?
– Commence par l’officielle ?
– C’est l’admirable président réélu depuis 37 ans à la tête de N°2…
– OK. Et en vrai ?
– Hmmm… Pour te situer, il était super pote avec les anciens maîtres de N°6.
– Ah oui, ça situe pas mal, reconnut Nezumi.
– Donc, c’est pas vraiment la franche amitié avec nous.
– Je m’en doute. »
Nezumi pensa que Shion devait aussi avoir à gérer une diplomatie bien lourde…
« Il est pas gentil, Sullivan, dit Haru. Il aime pas S’ion… »
Nezumi regarda l’enfant avec surprise. Haru insista :
« Si, c’est vrai ! »
L’entendant, Shion sourit et vint caresser la tête de son fils adoptif :
« Laisse Nezumi atterrir, mon bébé. On lui expliquera ça tranquillement…
-Mais c’est vrai qu’il t’aime pas, Sullivan !
-C’est vrai, mais c’est pas grave. »
Il sourit encore.
« On embêtera Nezumi avec tout ça plus tard. »
Karan et Haru repartirent bientôt. Yui et Adrian restèrent un moment. Shion se mit sans trop faire attention à parler boulot avec eux sans qu’aucun des trois ne réalise vraiment que Nezumi se retrouva totalement exclu la conversation en deux phrases.
Nezumi était fatigué. Il se cala vite dans les bras de Shion, écoutant en silence cette conversation à laquelle il ne comprit strictement rien, à part qu’il y avait un Conseil et dedans des gens qui faisaient bien chier.
Tout ceci lui semblait bien loin du calme de ces montagnes.

*********

Shion avait beau fredonner en conduisant, Nezumi le devinait un peu nerveux. Le soleil printanier était encore frais, mais rayonnant. Utopia était tranquille, en ce samedi après-midi, et Shion ramenait son Nezumi à la maison.
Les médecins avaient en effet jugé que si ce dernier avait encore besoin de repos, n’importe quel lit lui irait pour ça et plus nécessairement un lit d’hôpital.
Karan ramènerait Haru en début de soirée pour laisser aux deux tourtereaux quelques heures tranquilles.
Nezumi regardait la ville, en caressant d’une main distraite les souris sur ses genoux. Utopia était propre sans être immaculée, calme sans être fliquée, un endroit simplement vivant où on se sentait bien pour de vrai, et pas une illusion de perfection.
N°6 n’existait plus.
Reconnaissant d’ailleurs le centre-ville, Nezumi chercha machinalement du regard la « Goutte de Lune », l’ancien centre du pouvoir de la ville. Le voyant se pencher, Shion lui demanda :
« Qu’est-ce qu’il y a ?
– Elle est pas par la, la Goutte de Lune ?
– Elle était, oui. Juste là, à ta droite. Tu reconnais ? C’est le parc, elle était au centre…
– Était ? releva Nezumi.
– On n’en a fait un gros tas de gravats à grand renfort de dynamite ! »
Nezumi regarda avec surprise un Shion tout souriant à ce souvenir :
« Depuis le temps que j’en rêvais… »
Nezumi se souvint que Shion lui avait dit, un jour dans leur cave, qu’il avait toujours détesté ce bâtiment qui lui faisait penser à une verrue au beau milieu d’un visage.
« … Un rêve d’enfance ? sourit Nezumi.
– Oui !… Avec pour alibi qu’il fallait un symbole fort du changement de pouvoir, surtout pour les habitants de Bloc Ouest… Et puis, je voudrais être sûr qu’il ne puisse rien rester de Mother, ni de trace des tiens ou d’Elyurias… »
Cette dernière phrase surprit un instant Nezumi, puis il hocha lentement la tête. Shion ajouta :
« Et le bâtiment a été privé d’électricité et sous surveillance entre la chute du Mur et sa destruction…
– Et la puce ?
– Je l’ai détruite avant de revenir ici… Quand nous nous sommes séparés, en sortant du Centre Pénitentiaire.
– Donc, normalement, tout a disparu ?
– D’après Adrian, les chercheurs de N°6 n’avaient pas d’autres laboratoires. Il a tout fait vérifier, et Yui n’a rien trouvé de plus. »
Shion s’arrêta un feu rouge, et comme Nezumi ne disait rien, il le regarda. Son ami avait froncé les sourcils, sombre. Shion n’aimait pas lui voir cet air.
« Nezumi ?…
– Il faudra qu’on reparle de tout ça au calme… »
Shion haussa un sourcil, mais il dût redémarrer. Nezumi caressait toujours les souris installées sur ses genoux et dit :
« Tu n’as toujours pas trouvé de nom à ma petite souris noire ? »
Shion réfléchit une seconde.
« Encre. » Dit-il.
Nezumi sourit et prit la petite bête dans sa main :
« Qu’est-ce que tu en dis ? »
Elle couina joyeusement.
« Ça lui va. » traduisit Nezumi.
Shion sourit aussi et dit doucement :
« On arrive, mon joli rat… »
Nezumi regarda, curieux, la petite rue tranquille, bordée de maisons anciennes, le plus souvent au fond d’un jardin coquet.
« Ça fait très européen, nota-t-il.
– C’est l’ancien quartier français, lui répondit Shion.
– C’est joli… Pourquoi tu t’es posé là ?
– Un pur hasard… L’ancien propriétaire de la maison il me l’a léguée quand il a su, je ne sais pas comment, que je cherchais un logement… »
Shion s’arrêta devant un portail blanc et utilisa un petit bipeur. Le portail s’ouvrit et il s’engagea sur l’allée en sifflotant. Il s’arrêta à nouveau devant le garage et rebipa pour ouvrir ce dernier.
« Descends là, si tu veux… Dégourdis-toi les jambes pendant que je rentre la voiture ? »
Nezumi hocha la tête et descendit du véhicule. Il regarda autour de lui.
Le jardin était grand, devant une maison à deux étages, dont un en mansarde apparemment. La façade était en pierre, percé de deux fenêtres à droite de la porte d’entrée excentrée et une à sa gauche au rez-de-chaussée, quatre au premier et deux au deuxième, sous le rebord du toit. Il y avait deux velux sur ce dernier.
Un lierre épais couvrait toute la partie droite de la façade. Un banc de fer rouillait entre les deux fenêtres. À gauche de la maison, un petit garage où Shion rangeait la voiture.
Le jardin était laissé à l’abandon. La pelouse était envahie de mauvaises herbes, la haie qui le cachait de la rue n’avait pas dû être taillée depuis un moment et on devinait de vieux parterres de fleurs à certains endroits.
Par contre, le grand arbre planté presque au milieu se portait très bien et en ce jour printanier, il commençait à bourgeonner sagement.
Nezumi le trouva à la fois magnifique et rassurant. Il sourit alors qu’Encre venait se nicher sur son épaule, un peu intimidée de ce lieu inconnu, alors que Cravate et Lueur de Lune suivaient Hamlet, Macbeth et Juliette qui allèrent attendre devant la porte.
Shion rejoignit Nezumi :
« Le jardin te plaît ?… C’est un peu la jungle, je n’ai pas du tout le temps de m’en occuper.
– Cet arbre est superbe.
– Moui… Je l’aime beaucoup aussi. Tu viens voir la maison ? »
Nezumi laissa Shion lui prendre la main et l’entraîner vers la porte. Hamlet, assise sur son postérieur, couina impérieusement. Nezumi rigola :
« Eh, reste polie, tu veux, petite impatiente ! »
Shion avait ouvert la porte et ils laissèrent les souris entrer à toute allure. Encre couina sur l’épaule de Nezumi qui lui sourit :
« Notre nouvelle maison, Encre. »
Il caressa la petite tête noire :
« On y sera bien, ne t’en fais pas. »
Nezumi suivit Shion et découvrit un couloir à l’entrée duquel se trouvait un portemanteau. Shion enleva sa veste et ses chaussures en disant :
« Je t’avais acheté des pantoufles… J’espère qu’elles t’iront…
– Ah, merci… »
Nezumi le regarda ouvrir le tiroir d’un petit meuble à côté et en sortir une paire de pantoufles vert sombre :
« … En fait, j’avais récupéré ta paire à la cave, mais j’ai pensé qu’elles ne t’iraient plus… »
Nezumi avait enlevé ses bottes. Il prit ses pantoufles et sourit :
« Merci, Shion.
– De rien… Elles te vont ? »
Nezumi les enfila et hocha la tête :
« Ça a l’air… »
Shion sourit et regarda Nezumi. Ce dernier avait remis, à défaut d’en avoir d’autres, les vêtements qu’il avait lorsqu’on l’avait hospitalisé.
Shion trouvait qu’ils lui allaient très bien, tous atypiques qu’ils étaient ici.
Nezumi s’étira et enleva l’espèce de long poncho noir délavé qu’il portait par-dessus la longue tunique anthracite nouée à la taille par une ceinture de cuir et l’ample pantalon noir. Il suspendit le poncho au portemanteau, à côté de la veste de Shion, et y accrocha également la longue étole bordeaux sombre qu’il avait autour du cou.
Sur le carrelage du couloir, Encre rejoignit timidement les huit autres souris. Shion reprit :
« Nezumi, je te présente Iago, la teigne rousse, Roméo, l’albinos et Ophélie, la dorée… »
Omae arriva en bâillant du salon et s’approcha en remuant la queue, tranquille.
« Et voilà notre vieille Omae… »
Nezumi s’accroupit devant la chienne et caressa sa tête. La queue remua plus vivement.
« Coucou, ma belle, tu te souviens de moi ? »
La chienne jappa joyeusement. Nezumi se redressa et Shion lui dit :
« Donc, là, c’est l’entrée !
– Jusqu’ici je te suis. »
Nezumi attrapa Shion pour le tirer dans ses bras et le serra fort. Shion se laissa faire, caressa son visage, puis glissa ses mains dans ses cheveux alors qu’ils s’embrassaient. Ils étaient désormais de la même taille à 1 ou 2 cm que Shion ne rattraperait jamais.
« On continue ?
– À ta guise, Shion.
– Alors là à gauche, c’est mon bureau… »
Shion ouvrit une porte sur une petite pièce contenant un bureau couvert d’un incroyable bazar et tout autour de lui, sauf devant la fenêtre, des étagères elles aussi débordantes de livres, de dossiers et de paperasses.
« Euh, je crois que j’éviterais d’y rentrer…
– C’est une solution à envisager. »
Shion referma la porte en rigolant et reprit la main de Nezumi pour l’entraîner plus loin dans le couloir :
« Là à gauche, après le bureau, c’est les WC…
– Ah, ça peut servir.
– Moui. Et après, ça descend à la cave, j’y range pas mal de bordel… Et en face, là… »
Shion lui montra l’ouverture, face aux toilettes :
« Le salon… Enfin, salon et salle à manger. »
Nezumi entra dans la pièce, grande et claire, car éclairée par trois fenêtres, les deux de la façade et une sur le côté, face à l’entrée.
Le regard argenté fit le tour de l’endroit : tout de suite à sa gauche dans l’angle, la commode sur laquelle était posée leur photo (il sourit), un peu plus loin, le large meuble télé face au canapé. Dans l’angle, un vieux piano doré… Nezumi sourit encore, cette fois ému.
« … Mon piano ?… »
Les mêmes partitions accrochées au mur, à gauche et autour de l’instrument.
Nezumi s’approcha, caressa les partitions du bout des doigts, effleura quelques touches…
À droite du piano, la fenêtre, et à droite de la fenêtre, une grande étagère haute et couverte de livres. Devant elle, deux fauteuils et derrière eux, la grande table et ses huit chaises. Les deux fenêtres, de ce côté, étaient masquées par de légers rideaux blancs. Entre elles se dressait une grande horloge. Dans le dernier angle se trouvait quelque chose qui fit cette fois sursauter le garçon :
« C’est pas vrai ? ! »
Un vieux poêle à bois ocre…
Nezumi se tourna, stupéfait, vers Shion qui le regardait avec douceur :
« … C’est… ?
– Oui, oui. C’est lui… Sauf que maintenant, il est électrique. »
Nezumi se gratta la tête, mi-amusé, mi-gêné :
« Tu as récupéré tout mon bordel ou quoi ?
– Tu veux voir ? répondit Shion avec un grand sourire, les yeux pétillants.
– Tu m’inquiètes… »
Shion éclata de rire et vint prendre ses mains pour l’entraîner :
« Viens ! »
Nezumi le laissa le guider jusqu’à l’escalier, sans passer par la dernière pièce du rez-de-chaussée. Ils montèrent au premier étage, mais Shion ne s’y arrêta pas, emmenant directement Nezumi au second. Il s’arrêta en haut du deuxième escalier, devant la porte de la pièce et se tourna vers son ami, tout sourire :
« Tu fermes les yeux ?
– Tu m’inquiètes vraiment, là…
– S’il te plaît ?
– Bon, d’accord.
– Promis ?
– Promis. Je triche pas. »
Nezumi ferma donc les yeux et entendit la porte s’ouvrir, puis il sentit la main de Shion reprendre la sienne, il monta les deux dernières marches et entra dans la pièce. Il devina que Shion allumait la lumière, mais l’odeur du lieu le fit à nouveau sursauter.
« Tu peux ouvrir les yeux ! » chantonna Shion.
Nezumi obéit, incrédule, et resta bête lorsque ses yeux lui confirmèrent ce qu’il avait senti : à l’exception du piano et du poêle, il ne manquait rien à cette pièce. Elle était l’exacte réplique, sous les combles, de leur cave, de l’endroit où ils avaient vécu le premier hiver de leur histoire…
Le lit au fond, le canapé, la petite table… Et les immenses bibliothèques débordant de livres.
Nezumi porta ses mains à la bouche, les larmes lui montaient aux yeux. Le voyant, Shion rosit et détourna les yeux, gêné.
« … Ça te fait plaisir… ? »
Il se retrouva en un battement de cils entre les bras de Nezumi, contre sa poitrine, et l’entendit murmurer :
« Tu es vraiment un idiot… »
Nezumi renifla et ajouta :
« Merci. »
Shion se blottit contre lui, ferma les yeux et l’étreignit doucement :
« De rien… Tu sais, si j’avais pu, c’est là-bas que je t’aurais attendu… »
Nezumi lâcha Shion et fit quelques pas dans la pièce :
« Tous mes livres sont là ?
– Moui !… Tu en parleras à Adrian, je crois qu’il a encore mal au dos en y repensant. »
Nezumi rigola et Shion lui sourit encore :
« Tu veux les compter pour être sûr ?
– J’ai jamais su combien j’en avais…
– 4607. »
Nezumi regarda Shion un instant, puis exposa de rire. Shion lui tira la langue avant d’ajouter :
« 4619 avec les doublons. »
Nezumi le prit à nouveau dans ses bras et l’embrassa doucement :
« Tu es un grand malade, toi.
– Je sais ! » répondit joyeusement Shion.
Nezumi bâilla. Le voyant, Shion caressa sa joue :
« Tu veux allonger un peu ?
– Ça peut être une bonne idée.
– Viens, alors, je vais te montrer notre chambre. »
Ils redescendirent à l’étage inférieur. Shion lui montra la porte, un peu plus loin, dans le couloir qui partait à droite
:    « C’est là… »
Nezumi entra. La chambre était grande. Face à la porte, un énorme dressing noir, à sa gauche, le grand lit, défait à droite, encadré de deux tables de nuit en bois sombre. Au-delà du lit, un bureau devant une fenêtre. Au pied du lit, une grande armoire brune. Les murs étaient clairs. Avisant une porte tout de suite à droite de celle de l’entrée, Nezumi jeta un oeil interrogatif à Shion qui répondit :
« Une salle de bains… Il y en a deux, celle-là, c’est la plus grande, il y a une baignoire. »
Nezumi bâilla à nouveau en hochant la tête. Shion lui sourit avec tendresse :
« Couche-toi un peu, on n’est pas pressé. »
Nezumi hocha encore la tête et demanda doucement :
« Tu te couches avec moi ? »
Shion le regarda en biais avec un petit sourire :
« Tu penses à quoi, toi, là ?
– À rien qui ne te ferait très plaisir, ma petite fleur… » répondit innocemment Nezumi.
Le téléphone posé sur la table de nuit la plus proche d’eux sonna. Shion alla prendre le combiné.
« Oui, j’écoute… Oh, bonjour, maman. Oui, oui, on est bien rentré, on visitait la maison. »
Il s’assit machinalement au bord du lit.
« … Il a l’air… »
Nezumi vint se coucher derrière lui.
« … Oui, oui… Un peu fatigué, mais ça va. »
Shion fit la moue en sentant une main glisser sur son dos.
« … On n’est pas pressé… Tout se passe bien chez vous ?… »
Shion jeta un oeil sévère derrière lui en sentant une seconde main sur sa cuisse. Nezumi était allongé sur le flanc et le regardait avec un petit sourire et des yeux mi-clos, mais bien réveillés.
« … Oui ?… Ah, Jacques sera avec vous ?… Oui oui, non, aucun problème… Ça me fera plaisir de voir le père de mon petit frère ou de ma petite sœur… »
Les mains commencèrent à se faufiler, une sous la chemise de Shion après l’avoir un peu sortie de son pantalon, et l’autre plus haut sur la cuisse. Shion lança un nouveau regard sévère à Nezumi dont le sourire s’était élargi.
« … On vous attend à quelle heure alors ? » continua Shion en tentant de se relever.
Deux bras l’en empêchèrent sans lui laisser la moindre chance.
« Pour dîner ?… Ah, Jacques finit à 17h et vous venez après, d’accord… »
Shion s’était assis à nouveau et fit signe Nezumi d’arrêter son pelotage, mais son ami se contenta de lui tirer la langue.
« … D’accord, pas trop avant 18h30, pas de problème. Hein ?… »
La main sur sa cuisse se glissa sous la chemise pour aller caresser son ventre.
« Non, non, n’apportez rien, c’est pas la peine. C’est pour te remercier d’avoir gardé Haru et d’être venue nourrir la ménagerie, je vous invite. Oui, oui… D’accord. À tout à l’heure, maman. Embrasse Haru pour moi. »
Shion n’eut que le temps de raccrocher qu’il se retrouvait tiré sur le lit. Le combiné tomba sur le tapis.
« Nezumi ! râla Shion.
– Quoi ? » roucoula l’interpellé.
Il regarda Shion, dressé au-dessus de lui, sur ses bras. Il caressa son visage :
« Shion, j’ai très envie de toi.
– Tu dois te reposer…
– J’aurais tout le reste l’après-midi pour dormir… »
Nezumi sourit tendrement :
« Si tu as peur de m’épuiser, il suffit que tu y ailles doucement… »
Shion soupira et sourit enfin. Il se pencha et murmura :
« Mon joli rat est en manque d’affection…
– Tout à fait… »
Shion l’embrassa.
« Pôv’ petit rat… »
Le baiser se fit plus profond et Shion se coucha sur Nezumi. Les mains de ce dernier reprirent leur exploration sub-chemisesque et celles de Shion dénouèrent la ceinture de cuir et la retirèrent doucement. Les lèvres du jeune président bécotèrent le menton de son amant, puis descendirent sur sa gorge. Nezumi gémit en déboutonnant la chemise et en l’écartant. La chemise vola et la tunique prit rapidement le même chemin. Ils s’étreignirent, s’embrassant encore, puis se regardèrent. Nezumi caressa encore le visage de Shion :
« … Tu m’as tellement manqué… »
Shion murmura :
« T’as pas intérêt à partir encore une fois…
– Plus jamais. »
Ils s’embrassèrent encore.
« … Ensemble jusqu’en enfer, Shion…
– Quoi qu’il arrive, Nezumi. »
Les lèvres de Shion redescendirent dans le cou, puis sur la poitrine. Nezumi gémit en fermant les yeux. La langue de Shion jouait sur sa peau pâle, s’attardant sur ses tétons, puis descendit plus bas, traçant un long sillon jusqu’à son nombril pendant que ses mains s’affairaient à retirer son pantalon. Nezumi souleva son bassin pour l’aider et entrouvrit les yeux.
Shion était agenouillé entre ses jambes nues et écartées et regardait son corps avec un petit sourire gourmand qui semblait dire : par où je continue…
Une de ses mains se posa sur la cuisse de Nezumi alors que l’autre allait caresser son sexe, déjà bien réveillé. Nezumi gémit à nouveau et referma les yeux.
« Tu es magnifique, Nezumi… » murmura Shion.
Nezumi haletait. Il entrouvrit les yeux :
« … Fais-moi l’amour, Shion… »
Shion caressa plus fort d’une main pendant que l’autre ouvrait le tiroir de sa table de nuit pour prendre quelque chose.
Nezumi suivit l’action du coin de l’oeil, il commençait à se perdre dans son plaisir. Il ferma à nouveau les yeux en se mordant les lèvres alors que Shion accélérait le mouvement. Puis il sursauta, un peu plus tard, en sentant quelque chose de frais entre ses fesses.
« Eh ! »
Il se redressa sur ses coudes, pour voir Shion qui le regardait avec de grands yeux, étonné, un tube entre les lèvres.
« Échiya ? »
Nezumi sentit deux doigts le pénétrer avec une facilité déconcertante. L’éclair de plaisir qui le traversa le fit retomber sur le dos dans un cri.
« C’est quoi ÇA !
– Éhuhel…
– … Hein… ?… »
Shion lâcha son sexe une seconde, le temps de reposer le tube à côté d’eux :
« C’est du gel… C’est Yui qui m’a filé ça, il dit que ça fait glisser… Ça a l’air ! »
Ravi de l’effet du lubrifiant sur Nezumi, Shion s’appliqua à augmenter ces stimulations avec doigté, et les cris de Nezumi augmentèrent également.
Les mains crispées sur le drap, les yeux perdus très loin dans son désir, il finit par réussir à articuler entre deux cris :
« … Shi…on…
– Hm ? Répondit l’interpellé, tout rose.
– … Viens… »
Shion leva les yeux vers le visage de Nezumi qui lui sourit et tendit ses bras vers lui :
« Viens… Haleta-t-il. Viens, prends-moi, j’en peux plus… »
Shion sourit :
« À tes ordres ! »
Nezumi aida Shion à déboutonner son pantalon et à sortir son sexe. Shion se mit du gel et se positionna. Il le pénétra lentement en se rallongeant sur lui, passant ses bras autour de sa poitrine. Nezumi passa les siens autour de ses épaules et ses jambes autour de ses hanches. Ils s’embrassèrent alors que Shion se mettait à bouger en lui, doucement. Nezumi sourit entre ses lèvres. C’était juste ce dont il avait envie… Un gros câlin.
Shion s’était mis à haleter. Nezumi était étroit et le gel plus qu’efficace… Il accéléra à peine le mouvement, juste heureux de redécouvrir ce corps et de le sentir trembler de plaisir.
Nezumi dégustait avec bonheur… Il jouit rapidement, et comme lors de leur première fois, ce fut son orgasme qui provoqua celui de Shion en le faisant se resserrer brusquement sur lui.
Ils restèrent blottis l’un contre l’autre. Shion se retira, Nezumi étendit ses jambes et s’étira, soupirant d’aise. Shion fourra sa tête dans son cou, désireux de profiter encore d’un peu de tendresse.
Chaleur de Nezumi…
Un petit moment passa, puis Shion frissonna, ce qui le tira de sa torpeur. Il se redressa doucement. Nezumi dormait, un grand sourire aux lèvres. Shion sourit avec tendresse. Il se leva en faisant très attention à ne pas le déranger, le recouvrit de la couette, et resta un moment, assis au bord du lit, à le regarder. Il trembla encore et se leva. Il avait du ménage à faire et un bon dîner à préparer… Mais avant tout, une bonne douche.
Shion ouvrit le dressing sans un bruit, il n’avait pas envie de se casser la tête. Il prit un simple yukata gris bleu, un boxer propre, se dit que ça irait très bien et sortit. Il alla dans la seconde salle de bain, en fait un simple cabinet de douche, la première pièce à l’étage quand on arrivait du rez-de-chaussée. Entre elle et la chambre se trouvaient deux autres pièces : une salle de jeux qui servait aussi de chambre d’ami et la chambre d’Haru.
Shion redescendit en sifflotant. Une bonne petite soirée en famille… Une famille enfin complète. Et demain, un dimanche tranquille… Et il n’avait surtout pas envie de se rappeler qu’il retournait travailler au palais le lundi.
Il rangea le salon en chantonnant. Puis, il passa la cuisine, pièce tout en longueur et très bien équipée.
Ça faisait longtemps qu’il n’avait pas eu l’occasion de préparer un vrai repas, ce qui lui manquait, car il aimait beaucoup cuisiner.
Il s’attela donc à la tâche avec énergie. Rapidement, il fut cerné par plusieurs souris intéressées par d’éventuels déchets divers, sans doute dans l’unique but de ne pas encombrer inutilement la poubelle…
Il faisait frire des beignets de poulet en sifflotant lorsqu’il entendit, au-dessus de lui, Nezumi se lever. Il sortit son beignet de l’huile bouillante, éteignit la plaque sous cette dernière et remonta à l’étage.
Nezumi était occupé à ramasser ses vêtements éparpillés à droite à gauche dans la chambre.
« Bien dormi, Nezumi ? »
Nezumi le regarda. Il avait l’air fatigué, mais sourit :
« Oui, il est bien, ce lit…
– Moui. »
Shion s’approcha de Nezumi et passa ses bras autour de lui, tout sourire :
« Un grand lit pour nous… »
Le sourire de Nezumi s’élargit.
« Tu veux des vêtements propres ? lui demanda Shion.
– Euh, tu en as pour moi ?
– Un peu… Ça m’arrivait d’acheter des habits quand je me disais qu’ils t’iraient ou qu’ils te plairaient… Pour le reste, j’ai des vêtements un peu trop grands et larges pour moi, donc qui devraient t’aller… »
Shion entraîna vers le dressing et ouvrit les portes :
« Voilà ! Sers-toi. Ce que j’ai pour toi, c’est le rayon de droite. »
Il n’y avait pas tant de choses, mais Nezumi était stupéfait par l’idée que Shion pensait à lui au point de se dire en passant dans un magasin de vêtements : « Tiens, ça lui irait bien ça… ».
Il regarda ça avec curiosité. Cinq T-shirts, un vert sombre, un ocre, trois noirs, dont un avec sur l’avant une caricature de Hamlet tenant un crâne qui râlait : « Lâche-moi, j’ai le vertige ! », et un autre avec une petite souris grise qui regardait l’observateur avec un air dubitatif. Trois pulls, un ocre jaune léger, un noir tissé de fil argenté tout doux et qui semblait bien chaud et un noir à col roulé simple, mais à la coupe sympathique. Deux jeans noirs et un bleu. Un yukata noir aussi simple que beau. Il avait l’impression que c’était à peu près à sa taille, et de fait, ça lui plaisait plutôt.
« Merci, ma petite fleur…
– De rien, mon joli rat. »
Shion passa sa main dans les cheveux bleutés.
« Je vais continuer à préparer le repas…
– D’accord. Je me douche et je viens t’aider. »
Shion opina. Ils échangèrent un petit bisou, puis il redescendit en chantonnant. Il se remit à ces beignets. Il entendit Nezumi se laver et un peu plus tard, descendre l’escalier.
« Shion ?
– Je suis là, Nezumi. Juste en face de l’escalier. »
Nezumi entra. Il portait un jean noir et le pull à col roulé de même couleur.
« Ah,… Wahou. Jolie cuisine.
– Moui !… »
Nezumi vint dans le dos de Shion et passa ses bras autour de sa taille :
« Et qu’est-ce que tu nous mijotes de bon ?
– Salade avec beignets de poulet et croquettes de pommes de terre…
– Miam. Je peux t’aider ?
– Moui. Tu peux préparer la salade… Je vais te sortir ce qu’il faut… »
Nezumi n’eut pas le temps de protester qu’il pouvait chercher que Shion lui avait déjà tout mis sur la table. Un peu mal à l’aise, Nezumi alla prendre les légumes au frigo.
Il se sentait curieusement étranger, pas à sa place dans cette cuisine propre et moderne… Pourtant, les couleurs étaient chaudes et accueillantes, la pièce agréable et confortable.
Bah, se dit-il, il me faut un temps d’adaptation, après trois ans dans les cahutes de la forêt, c’est normal…
Ce sentiment de malaise ne le quitta pas vraiment, ce soir-là. Pourtant, tout semblait tranquille. Karan était radieuse, Jacques un peu timide, Haru tout content de rentrer. Les souris vivaient leur vie autour d’eux et Omae dormait sagement dans un coin. Était-ce à cause de ces conversations qu’il suivait mal, à propos de personnes et de choses qu’il ne connaissait pas… Il se sentait bizarrement exclu, même s’ils essayaient au maximum de tout lui expliquer. Il était fatigué et tout lui semblait incroyablement compliqué, bien loin du calme de la forêt.
Il se raisonna encore. Du temps, il lui fallait juste du temps…
Haru était tout excité. Après le dîner, il alla squatter les genoux de Nezumi, câlin, pendant que Shion préparait du thé. Le petit garçon ne voulait pas aller dormir… Il sommeillait pourtant dans les bras de Nezumi lorsque Shion revint.
Karan s’amusait à prendre des photos, ce qui n’était pas pour mettre Nezumi plus à l’aise.
Elle lui demanda gentiment, coudes posés sur la table et son visage entre ses mains :
« Nezumi, veux-tu que je te fasse un peu visiter la ville, lundi ? Je ne travaille pas.
-Ah,… Pourquoi pas, oui… balbutia Nezumi.
– Profitez-en pour lui refaire sa garde-robe… » proposa Shion en servant le thé.
Il ajouta avec un sourire :
« Je te laisserai ma carte de crédit.
– Pourquoi pas… » répéta Nezumi.
Karan et Jacques ne partirent pas trop tard, le médecin était fatigué. Nezumi coucha Haru pendant que Shion débarrassait la table. L’enfant s’endormit dès qu’il eut son bisou de bonne nuit. Nezumi resta à le regarder. Il était gentil, ce petit…
Shion arriva et, le voyant ainsi, sourit. Nezumi le regarda, se leva et le rejoignit à la porte de la chambre de l’enfant. Shion l’enlaça et se serra contre lui. Nezumi soupira et passa un bras peu énergique autour de ses épaules.
« Tu es fatigué, mon coeur ?
– Très.
– Allons vite nous coucher, alors… »
Ils fermèrent la porte sans un bruit et gagnèrent leur chambre. Ils se couchèrent rapidement, Nezumi à gauche et Shion de son côté, à droite. Nezumi était sur le dos et soupira encore en passant ses mains sur son visage. Il était épuisé. Shion éteignit la lumière et vint se blottir contre son flanc.
« Dors bien, mon joli rat.
– Toi aussi, ma petite fleur. »
La nuit fut paisible et lorsque Nezumi se réveilla, il se sentait plus en forme et songea qu’il avait bien envie de rendre à Shion la monnaie du câlin de la veille.
Avisant qu’il dormait à côté, en lui tournant le dos, il se glissa contre lui et passa un bras autour de sa poitrine… Du moins, c’est ce qu’il aurait fait s’il n’avait pas senti un petit corps chaud blotti entre les bras de son amant. Visiblement, Haru était venu discrètement pour finir sa nuit contre son père.
Shion et Haru dormaient paisiblement, le même sourire tranquille aux lèvres. Nezumi se sentit atrocement de trop face à cette image de tendresse.
Il se leva sans bruit, enfila son jean et quitta la chambre.
Il descendit au rez-de-chaussée. Le jour se levait à peine et le ciel était couvert. Le salon était sombre.
Omae et plusieurs souris vinrent à sa rencontre avec joie. Encre et Cravate grimpèrent sur son épaule. Cravate couina alors qu’Encre venait se frotter à sa joue, câline. Nezumi soupira et Cravate couina encore, insistant, alors qu’Encre levait un regard dubitatif vers son humain.
« Rien, rien, finit par répondre ce dernier.
– Squik ? Squik squik… ?
– Je sais pas, Cravate… »
Il alla mollement s’asseoir sur le canapé, étendit ses bras sur le dossier et regarda le plafond.
« Squik ?
– Non, c’est pas que je regrette d’être revenu…
– Squik squik ? intervint Encre.
– Non, vraiment. Je m’attendais juste pas à tout ça… »
Il soupira.
« Chuis crevé…
– Squik ?… Squik squik squik…
– Ouais, pas faux. J’ai faim aussi. »
Voyant les autres souris qui venaient aussi le saluer, il leur demanda :
« Vous savez où Shion cache ses provisions ? »
Elles approuvèrent et le précédèrent dans la cuisine. Là, Nezumi dut vite se rendre à l’évidence : sa volonté de préparer un bon petit déjeuner se heurtait à l’équipement bien trop moderne pour lui du lieu… Le nombre de boutons sur la plaque chauffante lui arracha un profond soupir et il n’eut même pas envie d’aller voir la théière électrique…
Bon, j’en suis quitte pour attendre que Shion se réveille… pensa-t-il. Si je peux grignoter une bricole en attendant…
Il farfouilla jusqu’à trouver un paquet de biscuits, un verre et du jus de fruits dans le frigo. Puis, il retourna se vautrer sur le canapé. Curieux, il avait envie de regarder un peu la télé. Cette dernière était en veille et il ne mit que deux minutes à comprendre le fonctionnement de la télécommande. Il fit attention à laisser le son assez bas. Il était encore tôt et les diverses chaînes proposaient qui des documentaires, qui des infos, quelques-unes des dessins animés, une série, de la musique… Il y avait une bonne dizaine de chaînes. Pas si mal pour une ville si jeune. Il lui semblait se souvenir que N°6 avait 34 chaînes, toutes étroitement contrôlées par le pouvoir.
Il s’arrêta sur une chaîne d’info et trouva immédiatement le ton assez détendu. Sérieux, mais détendu. Les journalistes faisaient leur travail, mais on sentait bien qu’ils ne risquaient plus leur vie au moindre faux pas.
« … La prochaine rencontre internationale se déroulera donc à N°5 dans six semaines, annonça la présentatrice. Même si notre délégation est invitée à titre amical, notre président s’est tout de même réjoui de la démarche d’intégration d’Amsterdam. Rappelons que l’an dernier, en effet, N°4 n’avait pas invité Utopia et que Shion Seijunna n’avait dû sa participation personnelle qu’à une demande exceptionnelle du prince de Téhéran, Ahmed Ibn Ibrahim.
– On se souvient encore des réticences de Dallas, continua son collègue. N°2 a en effet clairement exprimé son refus de reconnaître la légitimité de notre gouvernement et donc sa participation aux rencontres internationales.
– La question se pose donc de savoir si la rencontre de l’an prochain se déroulera ou non chez nous, comme la règle de l’alternance le prévoit.
– Notre président a déjà fait savoir qu’il était disposé à organiser la rencontre de 2021. »
Le visage tout souriant de Shion apparu à l’écran, sous-titré : « Déclaration du 2 mars 2020 ». Une voix lui demanda :
« Monsieur le président, est-il vrai que N°5 nous a invités à l’Annuelle de mai ?
– Tout à fait. J’ai eu le plaisir de recevoir un appel de Jessica Spiele. Amsterdam invite une délégation officielle et complète à participer à l’ensemble des rencontres, certes à titre amical, mais c’est un grand pas pour nous.
– Pensez-vous que votre participation personnelle de l’an dernier ait fait bouger les choses ?
– Ça, sans aucun doute ! »
Nezumi n’entendit pas la suite, car Haru pointa son nez dans le salon. Mais avant même que Nezumi n’ait le temps de le saluer, l’enfant se mit soudain à pleurer et fila en courant. Nezumi resta pétrifié. Puis, il se reprit, se leva et sortit prudemment du salon.
Shion descendait l’escalier tranquillement, l’enfant gémissant dans les bras.
« Allons, allons, c’est pas grave, Haru… On mangera autre chose au goûter, c’est tout.
– Shion ? l’appela Nezumi. Qu’est-ce qui se passe ? »
Shion lui sourit en arrivant en bas :
« Bonjour, mon chéri.
– Bonjour… Qu’est-ce qu’il y a ?
– Il semblerait que tu aies mangé le dernier paquet de ses biscuits préférés, qu’on gardait pour le goûter de cet après-midi… »
Nezumi détourna les yeux et se gratta la tête, navré :
« Ah… Désolé… J’avais faim et c’est tout ce que j’ai trouvé… »
Le sourire de Shion s’élargit et caressa d’une main la joue de son amant :
« C’est pas grave, mon chéri… Tu as encore faim ?
– Euh, oui… »
Haru jeta un oeil fâché à Nezumi en se blottissant encore plus fort contre Shion.
« … Je suis vraiment désolé, Haru… Je savais pas… bredouilla Nezumi.
– Tu nous feras des crêpes, pour ta peine, ça te va ? proposa Shion en reposant Haru qui leva aussitôt un regard tout brillant vers eux :
– Avec la confiture de Mamie ?
– Ben sûrement, s’il en reste. »
Le conflit apaisé, Shion entra dans la cuisine en disant :
« Bon, pour ce matin… Je crois que j’ai des oeufs, de la soupe miso, et de la salade… J’avoue que j’ai la flemme d’aller chercher des croissants, là.
– On va ‘egarder les dessins animés ? demanda Haru en le suivant.
– Quand on aura mangé, Haru.
– Tu peux me montrer comment marchent tes plaques de cuisson ? demanda Nezumi en entrant à son tour.
– Bien sûr, mon cœur. »
Ils mangèrent tranquillement à la petite table de la cuisine, puis ils allèrent se poser sur le canapé. Shion sourit en se voyant répondre encore à des journalistes, au sujet cette fois des réformes agricoles. Il zappa en demandant :
« Tu regardais les infos ?
– Oh, comme ça… Ça causait des rencontres entre les villes, là…
– Ah, les Annuelles… Ça, c’est le gros chantier du moment. Ça dure 10 jours par an et c’est un sacré bazar ! C’est plutôt bien que j’ai pu y aller en douce tâter le terrain l’an dernier et que cette année, on n’y soit comme observateurs. Ça laissera le temps de prendre nos marques… »
Ils passèrent la matinée devant des dessins animés, Shion contre Nezumi et Haru assis à côté. Nezumi avait un peu de mal à suivre, il finit d’ailleurs par s’endormir.
Ils mangèrent légèrement à midi, puis Shion alla coucher Haru pour sa sieste, après quoi il redescendit aider Nezumi à finir la vaisselle et préparer la pâte à crêpes, pour la laisser reposer quelques heures avant le goûter.
Les deux hommes allèrent ensuite se prendre un petit bain en amoureux… Et Nezumi put enfin rembourser dans les règles Shion du câlin de la veille.
Shion se donna sans se faire prier, ni se retenir. S’il n’avait exprimé aucun désir, il était tout à fait réactif pour répondre à celui de son amant.
Ils se câlinèrent encore longtemps dans l’eau chaude, Shion blotti entre les bras de Nezumi. Il caressa son tatouage, le long de son bras droit.
« Tu disais que c’était une prière ?
– Oui, une prière et un talisman de protection. »
Nezumi jouait tranquillement un petit air de piano lorsque Haru se réveilla et le rejoignit au salon. Shion avait reçu un coup de fil, il avait été s’enfermer dans son bureau.
Les souris entouraient le musicien et l’écoutaient religieusement, Omae également, couchée à côté. Haru trotta jusqu’à elle et s’assit par terre, contre la chienne, et Shion trouva toute sa maisonnée ainsi, lorsqu’il sortit de son bureau en grommelant, 20 minutes plus tard. Encore une demi-heure de perdue à résoudre un problème mineur, tout ça parce que la Conseillère chargée de la chose « n’était pas joignable » et qu’il était bien connu que lui répondait toujours.
Il en avait de plus en plus marre de servir de roue de secours et était bien décidé, à la prochaine réunion, deux semaines plus tard, à le dire. Mais il était bien peu sûr que ça aurait le moindre impact…
Il s’approcha doucement dans le dos de Nezumi et attendit qu’il finisse son morceau pour poser ses mains sur ses épaules et soupirer :
« Tu es vraiment doué, mon coeur… »
Nezumi leva le nez vers lui.
« Merci…
– Tu pourrais lancer la cuisson des crêpes ? J’ai faim…
– Oui, d’accord. »
Nezumi se leva. Il eut une mimique navrée et inquiète en voyant l’air las de Shion :
« Ça ne va pas, ma petite fleur ?
– Rien, rien… »
Nezumi haussa les sourcils, mais n’insista pas et se contenta de serrer fort Shion dans ses bras en lui murmurant :
« Ça va aller… »
Shion sourit.
Mais le vœu de Nezumi se révéla bien vain…
Le lundi, Shion ne partit pas trop tôt. Il emmena Haru pour le laisser à la crèche.
Resté seul, Nezumi tourna en rond un moment, un peu triste. Il faisait gris, ce jour-là. Il visita la cave, le garage, le jardin, découvrant à droite de la maison un auvent sous lequel se trouvaient un barbecue, une table et des chaises de jardin en bois, salies par l’hiver.
Karan devait venir le chercher dans la matinée. Il finit par remonter au second étage.
Cette grande pièce qui reconstituait son ancien foyer lui inspirait à la fois un profond réconfort et une tout aussi profonde mélancolie. Il s’assit sur le lit… Si dur… Il avait bien mal au dos là-dessus au début…
Son ancien foyer… Là où il s’était réfugié à son arrivée à Bloc Ouest, avec en poche tout ce qui lui restait de la vieille femme qui l’avait recueilli un moment : son couteau et la clé de cette cave étrange, débordante de livres, un peu en dehors du quartier. Cette cave où il avait passé avec Shion un hiver à se laisser doucement apprivoiser, à partager autant d’engueulades que de tendresse… Une petite vie bancale, toujours sur la brèche, où Shion, si dépendant de lui, était finalement devenu autonome…
… Au point d’être trois ans plus tard à la tête de cette ville.
Qu’est-ce que je viens faire, moi, là-dedans ?
Il secoua la tête et se releva.
Il lisait sagement en buvant du thé, replié sur un fauteuil, au salon, lorsque sa belle-mère frappa à la porte. Il alla lui ouvrir et la fit entrer. Elle l’embrassa maternellement et lui donna le courrier qu’elle avait relevé : trois enveloppes et deux journaux.
« Comment vous allez ? demanda Nezumi.
– Oh ! Tu me vouvoies à nouveau ? le gronda-t-elle gentiment.
– Du tout, répondit-il en désignant son ventre, je vous parlais à toutes les deux. »
Karan le regarda, surprise, et sourit :
« C’est bien trop tôt pour savoir son sexe, tu sais ? »
Il toussota, visiblement gêné :
« Oui euh… Tu veux du thé ?
– Volontiers. »
Il posa les enveloppes sur la commode, devant leur photo, mais les deux Unes des journaux le laissèrent dubitatif.
Celui qui s’appelait L’Aurore titrait : Nouvelle victoire de notre président et l’autre, La Libre Parole, Jusqu’où ira sa folie ?, avec la même photo de Shion qui faisait un clin d’oeil en tirant la langue.
Avisant la mine sceptique de son gendre, Karan lui expliqua :
« Ce sont deux des principaux journaux d’Utopia… Comme tu vois, l’un est du côté de Shion et l’autre pas vraiment…
– Et Shion est abonné aux deux ?…
– Il aime bien savoir ce qu’on dit de lui. Et puis entre nous, La Libre Parole est le plus souvent un tel ramassis de bêtises que ça en devient drôle… Il y a aussi Utopia, le journal officiel du gouvernement, qui sort le mercredi avec d’autres plus neutres… »
Nezumi hocha la tête. Il sourit en apercevant, en bas de l’article de L’Aurore, une petite caricature de Shion, à cheval sur une souris géante lancée au galop, le poing dressé vers l’avant.

Caricature de Shion
....une petite caricature de Shion, à cheval sur une souris géante lancée au galop, le poing dressé vers l'avant...

Leur thé bu, Nezumi, Encre et Cravate sur l’épaule, et Karan partirent tranquillement.
La circulation était fluide et Karan se gara à côté du parc central.
« Je te propose de nous promener un peu, de manger quelque part tranquillement et de continuer notre petit tour avant d’aller chercher Haru à la crèche…
– Ça me va très bien.
– Shion t’a laissé sa carte de crédit ?
– Oui, oui. Et il m’a bien inscrit dessus.
– Parfait.
– Je n’ai toujours pas ma carte d’identité, par contre… J’ai le papier provisoire…
– Oui, ils te le demanderont sûrement, puisque la carte n’est pas à ton nom… »
L’air était frais et les rues tranquilles. L’ambiance aussi était incroyablement sereine. Karan avait rapidement pris le bras de Nezumi et personne ne semble s’étonner ni s’offusquer que cette radieuse presque-quadragénaire (Karan avait 39 ans) se promène au bras d’un grand jeune homme portant une espèce de poncho noir et une étole bordeaux… Nichées dans les replis de cette dernière, les souris n’étaient pas visibles.
Ils arrivèrent bientôt dans une large rue piétonne bordée d’innombrables boutiques.
« On s’arrête où tu veux ! » déclara Karan.
Nezumi hocha la tête. Il ne savait pas trop ce qu’il voulait, à part qu’il lui fallait un peu de tout, et son absence totale d’éducation vestimentaire était un problème réel dans cette situation, problème que la présence de Karan pallierait sûrement.
Ils firent quelques boutiques où tout se passa très bien. Certes, les vendeurs étaient surpris au moment du paiement, le nom inscrit sur la carte n’étant pas n’importe lequel, mais Nezumi était bien autorisé à s’en servir et ses papiers, même provisoires, étaient en règle. Trois rigolèrent en voyant les souris et une jeune femme se permit un « Ah, vous aussi ? » amusé.
Ils s’arrêtèrent manger au Paddy’s, le pub préféré de Shion, Yui et Adrian, et Karan connaissait également. Nezumi apprécia l’endroit, son décor et son ambiance. L’après-midi, ils se promenèrent dans le parc. Nezumi constata avec amusement que les robots d’entretien n’avaient pas changé…
Ils allèrent à la crèche pour 16h. Karan sonna et ils entrèrent. Nezumi regarda avec curiosité les murs couverts de dessins de fleurs et d’animaux.
Karan était parfaitement à l’aise lorsqu’elle présenta « l’ami de son fils » à Rika, mais l’air un peu contrit de cette dernière n’échappa ni à Nezumi, ni à sa belle-mère. Haru était fatigué, mais ravi que Zumi et Mamie soient là pour lui et il squatta les genoux de son second père, jouant avec les souris, tout le temps que ce dernier passa à remplir avec la directrice les formulaires l’autorisant à venir chercher le petit garçon ainsi qu’à être contacté en cas de problème, car il avait, le concernant, par délégation de Shion et Karan, les mêmes droits qu’eux.
La directrice ne fit aucune difficulté, aimable et professionnelle. Nezumi ne comprenait pas grand-chose à tout leur jargon, mais il signa poliment ce que Karan lui indiqua.
Karan les ramena ensuite tranquillement chez eux.
Nezumi fit goûter le petit garçon. Haru était grognon, il n’avait pas fait la sieste. Ne sachant pas trop comment gérer ça, Nezumi lui fit un câlin, lui chanta une berceuse, lui lut un conte de fées, et finit par le poser devant la chaîne pour enfants au pouvoir aller préparer le dîner. L’heure tournait, et lorsque Shion l’avait appelé 30 secondes pour lui dire qu’il espérait être là avant 20 h, il avait l’air aussi épuisé qu’énervé.
Nezumi coupait des légumes, en laissant les souris dévorer les chutes, lorsque Haru pointa son nez dans la cuisine, suivi d’Omae.
« Zumi ?… Tu fais quoi ?…
– Je prépare une soupe, poussin. »
L’enfant grimpa sur une chaise et s’assit à côté de lui :
« Tu fais la soupe de Macbé ? »
Comme Nezumi le regardait sans comprendre, l’enfant reprit :
« S’ion il fait une soupe qu’il dit que c’est toi qui lui as appris et il l’appelle la soupe de Macbé… »
Comprenant enfin, Nezumi sourit :
« Trois fois le chat tacheté a miaulé…
Trois fois et une fois le hérisson a grogné
La harpie crie “Il est temps, il est temps”
Tournons en rond autour du chaudron,
Et jetons-y les entrailles empoisonnées
Crapaud, qui sous la froide pierre
Endormi trente-et-un jours et trente-et-une nuits
A mitonné son venin
Bous le premier dans le pot enchanté.
Filet de couleuvre des marais
Dans le chaudron bous et cuis.
Oeil de salamandre, orteil de grenouille
Poil de chauve-souris et langue de chien
Langue fourchue de vipère, dard de reptile aveugle
Patte de lézard, aile de hibou
Pour faire un charme puissant en trouble,
Bouillez et écumez comme une soupe d’enfer.
Écaille de dragon, dent de loup
Momie de sorcière, estomac et gueule
Du requin dévorant des mers,
Racine de cigüe arrachée dans l’ombre
Foie de juif blasphémateur
Fiel de bouc, branches d’if
Cassées dans une éclipse de Lune
Nez de Turc et lèvre de Tartare
Doigt d’un marmot étranglé en naissant
Et mis bas par une drôlesse dans un fossé
Faites une bouillie épaisse et visqueuse
Ajoutons les boyaux de tigre
Comme ingrédients dans notre chaudron
Toutes les trois :
Double, double, peine et trouble !
Feu brûle ; et chaudron bouillonne ! »
Comme l’enfant le regardait avec de grands yeux, à moitié rassuré, il ajouta gentiment :
« C’est dans une pièce de théâtre. Trois sorcières qui font bouillir une énorme marmite… »
Omae bâilla et se coucha sur le carrelage.
Nezumi mit la soupe à mijoter et retourna au salon regarder des dessins animés avec Haru en attendant Shion.
Il se décida à faire dîner le petit garçon affamé un peu avant 20 h, Shion n’étant pas là, puis le lava et le mit en pyjama. Il lui lisait une autre histoire, pour le détendre avant de l’endormir, lorsqu’ils l’entendirent rentrer.
Ils tendirent l’oreille ensemble. Il était en train de parler d’un ton excédé, même s’ils ne comprenaient pas ce qu’il disait. Nezumi soupira, sourcils froncés. Il posa le livre et se leva :
« Tu attends ? Je vais lui dire de venir te faire un bisou.
– Oui ! »
Nezumi descendit lentement. Le ton ne baissait pas. La voix venait du bureau. Il était plus de 21 h.
« … Je m’en fous, vous me réparez ces serveurs, vous y passerez la nuit s’il le faut !… Vous croyez quoi, que les malades vont vous attendre ? ! Je m’occuperai personnellement du responsable de ce foutoir, soyez-en sûr, mais en attendant il faut relancer ces serveurs, c’est tout !… »
Nezumi s’arrêta à l’entrée de la pièce et regarda tristement son amant raccrocher et passer ses mains sur son visage. Il n’avait même pas enlevé sa veste, ni même posé sa mallette. Sur le bureau, Hamlet le regardait avec inquiétude.
Shion, lui, regarda Nezumi avec un soupir. Il était pâle, des poches sous les yeux, le regard rouge presque vitreux.
« Ça va, Shion ?
– Non. »
Navré, Nezumi rentra dans le bureau et vint le prendre dans ses bras. Shion soupira et ne l’étreignit qu’une seconde avant de se dégager. Il enleva sa veste. Nezumi lui dit, mal à l’aise :
« Haru attend ton bisou de bonne nuit…
– Quoi ? sursauta Shion. Il ne dort pas ?
– Je lui lisais une histoire… »
À la grande surprise de Nezumi, Shion s’écria :
« Mais t’es malade, il a trois ans ! Faut pas le laisser veiller comme… »
S’apercevant du regard à la fois stupéfait et blessé de Nezumi, Shion stoppa net sa tirade. Nezumi bredouilla, le regard fuyant :
« Désolé… Je… On t’attendait… Ça me paraissait normal qu’il veuille t’attendre… On s’inquiétait, quoi… »
Shion se gratta la tête, vint vers Nezumi et l’embrassa rapidement :
« Excuse-moi… J’en peux plus, là… »
Nezumi le regarda et marmonna :
« T’as faim ?
– Très.
– Alors file embrasser ton fils. Je vais réchauffer la soupe et mettre la table. »
Nezumi sortit rapidement sans rien ajouter. Shion le regarda faire, secoua la tête et fila à l’étage. Haru suçait son pouce, son doudou dans les bras, peinant à garder les yeux ouverts. Il sourit pourtant, radieux, en voyant Shion et tendit aussitôt ses petits bras vers lui. Shion s’assit au bord du lit et serra très fort son fils dans ses bras. Il le coucha rapidement, l’embrassa, lui assura que tout allait bien et qu’il pouvait dormir tranquille.
Haru s’endormit à la seconde et Shion redescendit. Nezumi avait mis le couvert à la cuisine et servait la soupe dans des bols. Son visage était fermé et Encre, sur son épaule, un peu agitée. Autour de lui, les autres souris aussi semblaient nerveuses.
Shion s’assit devant un bol fumant et regarda Nezumi poser le pain sur la table avant de faire de même.
« Merci, mon joli rat. »
Nezumi grommela sans répondre.
« Elle sent toujours aussi bon, ta soupe…
– Hm.
– J’ai souvent essayé de la refaire… Je n’y suis jamais arrivé. »
Nezumi eut enfin un petit sourire :
« Faut bien que je te surpasse, de temps en temps. »
Shion rigola doucement :
« Il y a beaucoup de domaines dans lesquels tu me surpasses ! »
Il y eut un silence, puis Shion reprit :
« Je suis désolé… Avec ce plantage de serveurs, j’ai pas vu le temps filer. Je vais essayer de faire gaffe… Promis. »
Nezumi hocha la tête.
« Ça serait bien… Bon appétit, ma petite fleur. »
Promesse bien vaine face à la réalité des deux semaines qui suivirent.
Débordé par la préparation de l’Annuelle comme par le reste dont personne ne l’avait déchargé, Shion se levait très tôt, rentrait très tard, épuisé et sur les nerfs, et il était bien rare qu’il ne reçoive pas encore au moins un coup de fil dans la soirée. S’il lui en avait assez, ce n’était rien à côté de ce que ressentait Nezumi.
Ce dernier n’était même plus vraiment triste, ni en colère, ni même trop perdu… Il savait juste qu’il n’était pas revenu pour ça.
Il passait ses journées à lire dans le grenier, en attendant l’heure d’aller chercher Haru.
Lorsqu’enfin, Shion lui dit un soir, au bout de deux semaines, qu’il allait avoir son week-end, Nezumi se sentit profondément soulagé. L’idée de pouvoir passer deux jours entiers avec Shion lui faisait réellement plaisir. Il se disait qu’il allait pouvoir lui parler, le cajoler un peu et surtout, il avait très envie de lui.
Karan accepta sans difficulté de garder Haru du vendredi soir au dimanche en fin d’après-midi, lorsqu’il lui demanda. Elle sentit bien qu’il voulait un moment à eux et ne le comprenait que trop bien.
Nezumi prépara un bon dîner pour le vendredi soir et lorsque Shion appela pour l’avertir qu’il rentrerait plus tard que prévu, il prit encore sur lui, malgré sa déception, en se disant que Shion voulait tout boucler pour être tranquille avec lui le reste du week-end.
Shion rentra à plus de 23h, ivre de fatigue. Il ne put que manger en vitesse, se doucher et aller s’écrouler dans leur lit.
Nezumi commençait à le câliner tendrement, au matin, décidé à lui faire oublier tout son stress, et Shion se laissait faire, enfin un peu détendu, lorsque son portable sonna.
Nezumi poussa un soupir excédé quand Shion prit l’appareil et décrocha.
Risque d’accident majeur sur un des plus gros complexes industriels de la ville. Personne ne voulait se mouiller à prendre une décision et la Conseillère chargée de l’industrie était injoignable. Arrêter l’usine risquait de rompre des accords internationaux très importants en retardant la livraison du matériel, mais si l’accident avait lieu, près d’un tiers de la ville risquait d’être sinistrée, au mieux privée d’électricité et d’eau potable, ou pire purement et simplement rasée par le souffle de l’explosion.
« C’est bon, j’arrive… »
Shion regarda Nezumi en raccrochant. Ce dernier avait l’air plus triste qu’autre chose. Shion lui fit un petit bisou :
« Je fais vite… »
Nezumi grogna. Shion partit.
Lorsqu’il rentra, il était encore au téléphone avec un des responsables du site qui chougnait contre sa décision d’arrêter l’usine tant que le risque n’était pas écarté. Shion était à bout de nerfs, ce type le harcelait depuis des heures…
Shion entra dans son bureau en criant, excédé :
« Une fois pour toutes, je me contrefous de vos bénéfices et de vos actionnaires ! Cette usine sera à l’arrêt jusqu’à ce que les ingénieurs de la Sécurité Industrielle donnent leur accord, POINT FINAL ! Alors maintenant vous me lâchez, bon week-end ! »
Il raccrocha en tremblant et jeta son téléphone sur le bureau. Il enleva sa veste, tentant, en vain, de respirer profondément pour comprendre un peu son calme.
« … Shion ?… Ça va ?… » demanda la voix inquiète de Nezumi dans son dos, le faisant sursauter.
Comme il ne répondait pas, Nezumi s’approcha dans son dos et voulut l’enlacer, mais Shion ne le vit pas et fit un pas pour poser sa veste sur le bureau.
« Shion… ? »
Nezumi ne renonça pas, fit aussi un pas et passa doucement ses bras autour de ses épaules :
« Allez, laisse-moi te faire oublier tout ça… »
Shion se dégagea avec un soupir :
« … Pas envie… »
Les bras de Nezumi retombèrent alors qu’il regardait Shion, réellement blessé. Il balbutia :
« Shion… S’il te plaît, faut qu’on parle, là… »
Shion se tourna enfin pour le regarder sans comprendre.
« Qu’est-ce qu’il y a ? demanda-t-il.
– J’en ai plein le cul, Shion ! répondit Nezumi bien plus violemment qu’il ne l’aurait voulu. Ça fait presque trois semaines que je suis là et j’ai l’impression que tu t’en fous ! »
Shion sursauta, stupéfait. Nezumi continua, incapable de retenir ce qui était devenu une véritable colère :
« … Je suis quoi pour toi à la fin ? ! La nouvelle nounou de ton fils ? !… Ta gentille bobonne qui t’attend le soir avec un repas ? !… J’en ai marre de pas te voir, marre de me réveiller sans toi, de vivre sans toi !… J’ai envie de te voir, de partager ta vie et pas juste de vivre dans ta maison !… »
S’il avait été dans son état normal, Shion aurait sans doute simplement sauté au cou de Nezumi pour le rassurer, trouver les mots doux qu’il voulait entendre. Mais il était épuisé par des mois de boulot et sur les nerfs de ces heures passées à gérer cette histoire d’usine. Nezumi était juste sincère lorsqu’il dit encore :
« … Et oui, je crève d’envie de toi ! On a baisé deux fois depuis mon retour, le week-end où je suis arrivé ici… »
Il y eut un silence et Shion soupira encore :
« … J’ai pas envie… »
Nezumi balbutia :
« Tu n’as pas… Envie de moi… ?… »
Shion se massait les tempes, il ne vit pas son regard désespéré.
« S’il te plaît, fous-moi la paix, Nezumi… On peut pas parler de ça plus tard ?…
– Shion, ça fait trois semaines que j’attends… »
Shion explosa :
« Et moi, je t’ai attendu trois ans ! Trois ans, chaque jour, et tu reviens pour quoi ? ! Pour me faire des reproches ? ! Pour pleurer parce que tu veux me sauter ? ! Putain mais si t’as le feu au cul à ce point, retourne te faire baiser dans ton bordel ! »
Le poing s’abattit sur sa tempe avec une violence inouïe avant même que Nezumi n’en ait lui-même conscience. Shion s’écrasa contre une étagère et serait sans doute tombé au sol si deux mains n’avaient pas saisi son cou. Elles serraient bien trop fort, mais Shion était trop sonné pour même s’en rendre compte. Il ne vit pas la haine dans les yeux gris, ni n’entendit la voix qui cracha :
« Connard !… Ça t’amuse de me traîner dans la boue, M. L’Élite ? !… Tu vas voir comme c’est marrant de se faire mettre à sec… »
Il le jeta au sol. Shion commençait vaguement à revenir un peu à lui lorsqu’une main le poussa dans le dos, l’écrasant face contre terre. Il ne pouvait pas lutter et n’essaya même pas, à peine conscient qu’on lui arrachait son pantalon.
La douleur qui traversa brusquement son corps lui arracha un cri aussi fort que bref. Il serra les dents et endura sans comprendre. Il y eut ensuite un long silence, le bruit d’un sanglot, la porte d’entrée claqua, et ce fut le silence à nouveau.
Shion finit par ouvrir les yeux en sentant la langue d’Omae sur sa joue. La chienne couinait et tout autour, les souris le regardaient, comme gênées, n’osant pas approcher. Shion toussa et se redressa sur ses bras. Il avait mal de partout.
Il se releva, flageolant, se rhabilla. Il ne comprenait rien… Il sortit du bureau en traînant les pieds, jeta un œil dehors, mais Nezumi n’était plus là. Hagard, il rentra, remonta le couloir et mit un pied dans le salon.
Et sursauta.
Sur la table étaient joliment mis des couverts et un repas, des petits plats préparés et disposés avec soin, pour deux personnes.
Shion s’était mis à trembler, mais il ouvrit les yeux immenses, effaré, en voyant l’heure à l’horloge : 17 h 40.
Les larmes lui montèrent aux yeux.
« Non… »
En comprenant que Nezumi, à qui il avait dit qu’il faisait vite, avait passé sa matinée à cuisiner… Son après-midi à l’attendre… Cette journée qu’ils devaient enfin passer tous les deux, ensemble… Nezumi l’avait passé seul.
Nezumi était parti.
Shion s’écroula sur le sol et éclata en sanglots.

À suivre dans le chapitre 5 : Ta Place dans ma vie.

(24 commentaires)

  1. arrgh ! un peu plus et je pleurais …mais c’est bien, la situation est compliquée et tu la fais évoluer de façon réaliste, beau travail ! … J’avoue qu’au début du chapitre, je suis dit ” ah il a du lui faire une remarque sur les trois ans d’attente, ou sur Haru ..mais pourquoi t’es parti Nezumi ?!” mais là pour le coup, Shion .. *mode Haru on* il est pas gentil ! *mode Haru off” xD

    oui je serai toujours pour Nezumi moi aussi …

    je sais je me répète mais… MERCI ^^

    1. @Maru : Merci ^^ !!! J’en ai vraiment mais vraiment sué sur ce chapitre, pour montrer la brèche jusqu’à la cassure sans que ça aille trop vite… Lis vite le suivant ça ira mieux ^^ !

  2. ah pareil, soleil mais très froid ! j’veux de la neige et y’en a pas alors que j’habite les Vosges ça m’éneeeerve! Sinon j’me demandais… pourquoi tu postes pas tes fics sur Fanfiction.net ^^ ?

    1. @MiniP : Elles y sont ^^ ! Elles y sont toutes… Va relire “Moi”, tu trouveras le lien 😉 ! J’y suis en fait sous un autre pseudo. 😉

    1. @MiniP : Mouahahahah je suis trop machiavélique avec mes cliffhangers de ouf :p ! ^^ Sinon je te souhaite un bon WE ^^ ! Il fait beau chez toi ? 🙂 Ici grand soleil, glacial bien sûr…

  3. owi un câlin 😀 ! héhé j’ai de la chance moi j’ai le mouchoir ET le câlin ! il leur faudrait ça à Nezumi et Shion aussi, un bisou de l’auteur :)!

  4. Arg… moi aussi je vais pleurer >.< ! Il a pas tord en même temps Nezumi… ( j'serai toujours du côté de Nezumi d'abord ! ) En tout cas bravo pour ce long chapitre ! Et bon courage pour la suite, j'ai très hâte de la lire :3 ! bisous !!

  5. Ça fini mal, j’espère que le prochain va être un peu plus “heureux”, j’ai failli pleurer. TwT

    Sinon, j’aime toujours autant, je suis pressée de voir la suite. ^w^

  6. Tu as raison les bonnes choses doivent se faire attendre parfois. mais point trop n’en faut… comme tu l’as dit on ne peut pas laisser nos bishonen préférés ainsi. Prends le temps qu’il faut, ton travail sera toujours apprécié

    1. @Amakay : Merci ^^ ! Comme je l’ai dit, j’ai une autre fic en cours et je me dois de la bosser aussi, mais je vais essayer de faire vite, ça m’embête de les laisser comme ça 😉
      A bientôt !

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