Réflexions d’un autre genre (Spécial 17 mai)

Salut tout le monde ! 😊

En ce beau dimanche de mai, alors que mes premières tomates poussent et qu’on attend de nouveaux orages, je me demandais un peu quoi vous raconter, n’ayant pas masse d’idée. Je n’ai pas particulièrement envie de vous parler du film que j’ai vu ce matin et j’avoue humblement que l’actualité du moment ne soulève pas chez moi un enthousiasme délirant…

Et puis, j’ai repensé que je n’avais pas fait de coucou spécial pour le 17, cette année, sûrement parce que ma journée de mercredi a été bien trop chargée pour me laisser le temps de réaliser à temps quel jour nous étions. J’ai vu les messages à droite à gauche, plus ou moins inspirés et inspirants, joyeux ou déprimants, commémorations diverses et déclarations lénifiantes de nos dirigeants, surfant comme à leur habitude sur la vague pour exprimer une solidarité verbale qu’ils oublient dès qu’il s’agit de la mettre factuellement à l’œuvre.

Je suis aussi de mon œil ce qui se passe ailleurs, ces pays qui nous condamnent toujours à mort comme si c’était ça leur problème, ceux qui voudraient bien, mais bon, essayent de faire genre “mais non on a rien contre vous” pour mieux grappiller nos droits. Et comme ça ne fait pas plus réagir que ça alors, ils grappillent toujours plus… Mais aussi, c’est vrai, ceux qui malgré ce vent inquiétant, se disent qu’on a le droit de vivre et lâchent du lest.

Je regarde avec inquiétude ce qui se passe au États-Unis, en Europe de l’Est : des réelles régressions qui tuent pour de vrai. Droit des femmes, droits des LGBTQIAàZ+, même combat et pourtant, nous avons rarement été si divisés nous même.

Je n’ai pas vraiment prémédité ce texte, et je l’écris un peu comme ça vient, alors, prenez-le pour ce qu’il est : la réflexion d’une petite quadra qui regarde avec autant d’intérêt que d’appréhension ce que devient son monde. Pas de leçon, pas de grand discours ici, juste l’envie de poser quelques trucs.

Pour me situer, déjà, dans ce boxon, rappelons aux personnes qui n’ont pas suivi les bases. Je suis née en 1981 dans une famille de cathos de gauche assez colorée, si on considère qu’en plus de mon frère aîné et de moi, mes parents avaient adopté une petite Indienne et un jeune franco-maghrébin. Mon père était à moitié polonais, mais cette partie-là de la famille est partie avant que j’arrive, je n’ai donc pas plus d’attaches que ça avec cette hérédité. Ceci pour dire que j’ai eu assez vite en tête que les humains pouvaient être assez différents les uns des autres, en tout cas en terme de couleurs… La question de la diversité de mœurs, disons, est cependant arrivée assez vite, enfin dans la mesure où on la percevait à l’époque.

Pour être honnête, je ne me souviens pas de quand j’ai découvert l’existence des homosexuels. C’est une réalité qui était là, dans mon monde, si pas dans ma vie : certains hommes aimaient d’autres hommes et certaines femmes d’autres femmes et c’était comme ça. Mes parents n’étaient pas particulièrement gay-friendly, je les soupçonne même d’avoir été des espèces d'”homophobes bienveillants”, en bons petits cathos de gauche qu’ils étaient, mais comme on n’en parlait pas, je n’ai pas eu à me débattre avec leurs aprioris.

Les années 80 et 90 ont vu ce que je qualifierais, peut-être un peu maladroitement, de “deuxième vague” de militantisme LGBT. Ce qui avait commencé aux USA, à Stonewall, à la fin des années 60, et qui n’avait pas vraiment pris en Europe, va débarquer en force “grâce” au SIDA. La pandémie va ravager la communauté (et reste un trauma réel pour ces générations), mais aussi lui faire prendre sa place comme corps social dans nos sociétés, pour le meilleur et pour le pire. Le droit de vivre s’est ainsi exprimé tout d’abord au sens propre : survivre à la maladie, organiser la prévention, l’accès aux premiers traitements…

Le SIDA n’était plus vraiment “le cancer des pédés” quand j’ai atteint l’âge de m’y intéresser. On commençait à comprendre que le virus s’en foutait un peu de qui il contaminait et que personne n’était vraiment à l’abri (enfin chez nous, certaines actualités récentes montrent qu’hélas, quarante ans plus tard, ce n’est toujours pas monté au cerveau de tout le monde). Les années 90 ont alors vu les choses évoluer. De “On veut vivre.”, on est passé  à “On veut vivre à égalité avec les autres.” et c’est là que des revendications politiques ont émergé, conduisant au PACS en 1999, puis, après bien des tergiversations d’élus qui-n-avaient-rien-contre-nous-mais-bon-quand-même, à l’adoption du Mariage pour Tous il y a dix ans. Glas des résidus lgbtphobes qui traînaient encore ?

Si seulement.

Pour ma part, je n’ai jamais été militante de terrain, pas l’âge, pas le temps, jamais vraiment l’envie. Si j’ai eu quelques contacts, dès la fin de mon adolescence, avec les (rares) associations de Lyon de l’époque, je ne m’y suis jamais sentie suffisamment bien pour en faire mon repaire. J’ai cru, comme beaucoup et à tort, que ce n’était plus vraiment la peine de se battre. Un peu comme on avait vendu à ma génération l’idée que l’égalité des sexes était acquise, on nous vendait celle que les droits des minorités sexuelles, comme on disait alors, étaient de même obtenus ou qu’ils le seraient vite. Depuis, je milite en écrivant. Chacun sa voie et je n’ai, en plus, plus vraiment l’énergie d’aller marcher quelques heures entre des chars désormais bien trop bruyants pour moi.

J’ai eu la chance de pouvoir mettre très tôt un nom sur ce que j’étais, ou plutôt, pour être exact, sur la façon dont on le disait à l’époque. Je ne vais pas m’étaler là-dessus aujourd’hui, mais notre conception de tout ça a beaucoup BEAUCOUP bougé en trente ans. ^^”

C’est là-dessus, en fait, que je voulais venir, désolée de la longue introduction.

Lorsque j’étais ado, et à part peut-être pour bien peu de personnes, la communauté des minorités sexuelles tenait bien en quatre lettres : LGBT, lesbiennes, gays, bisexuel(le)s, transsexuel(le)s. Certains rajoutaient parfois un “Q” pour “queer”, mot valise censé englober “tout le reste”.

Et tout ce petit monde se rassemblait sous une seule bannière : le Rainbow Flag, l’arc en ciel qui symbolisait donc “toutes les couleurs de l’amour”.

Alors, très loin de moi l’idée de vous sortir le sempiternel “c’était mieux avant”, parce que bien sûr que non. Mais n’empêche que l’idée d’une seule famille, même si complètement fantasmée dans les faits, était là.

Les années ont passé et, avec le PACS, puis donc, le mensonge établi que “ça allait”, et enfin le Mariage pour Tous, on a assisté à un phénomène intéressant : une certaine scission entre les membres de la communauté qui pouvaient désormais vivre “normalement” (c’est à dire en ayant adopté les normes hétéropatriarcales) et les autres. L’apparence d’acceptabilité, principalement pour les gays et les lesbiennes, a poussé pas mal de monde à baisser sa garde.

A tort…

Parallèlement à ça sont alors apparues bien d’autres minorités revendiquant elles aussi ce besoin de visibilité et d’acceptation. Finalement assimilé aux gays cisgenres, bien que ce dernier terme pointait à peine le bout de son nez alors, le Rainbow Flag a perdu toute sa valeur universelle. Nous avons constaté avec scepticisme, puis, j’admets, un certain dédain un peu moqueur, l’irruption dans le débat d’une myriade de sous-commus de sous-commus, chacun ou presque y allant de son mot pour se définir, au point que ça en devienne aussi insensé (au sens propre, dénué de sens) qu’imbitable. 

Je reconnais sans mal avoir regardé ça avec cette même perplexité un peu goguenarde que beaucoup. Cette impression de se noyer dans des cases toutes plus réduites les unes que les autres, ce besoin de réinventer la roue, sur des générations jugées avec mépris comme nombrilistes, occupées à chougner “moi-moi-moi”, par leurs ainées, était une réalité.

J’avoue y avoir été assez hermétique jusqu’à ce qu’un jour, au détour d’un article dont j’ai tout à fait oublié l’autrice et le titre et je m’en excuse, cette personne ne m’assène une vérité qui m’a fait tout remettre à plat : les personnes n’ayant jamais douté, ou très peu, de ce qu’elles étaient ne pouvaient pas comprendre ce besoin de mots qu’avaient celles qui le cherchaient, l’avaient cherché pendant des années.

Et c’était vrai : comment une femme qui avait eu la chance de pouvoir tout de suite ou quasi se définir comme bi/pan pouvait appréhender des errances de jeunes trans par exemple, minorité très peu et mal représentée dans les médias, encore plus à l’époque ?

A la réflexion, il est notable de considérer qu’effectivement, et au sein même de la communauté, les personnes qui grommellent le plus contre tous ses nouveaux étendards sont souvent celles qu’ils ne concernent pas… Par exemple les gays cisgenres, qui, eux, ont la chance d’être à l’heure actuelle plutôt beaucoup et plus si mal représentés.

Petite parenthèse, il est extrêmement intéressant aussi, à ce sujet, de mettre ça en parallèle avec le sexisme sociétal : une minorité, même conspuée, sera toujours plus visible si elle est masculine ou perçue comme telle. Ainsi donc, la communauté gay cisgenre est à ce jour la partie la plus visible et représentée de l’arc en ciel, même si ça bouge un chtit peu.

Corollaire de cette façon binaire et bornée de voir le monde : si la question de la transidentité est aussi très polarisée sur les femmes trans, encore beaucoup considérées comme “des hommes qui veulent devenir des femmes”, ce n’est à mon sens pas un hasard non plus. Et l’absence quasi complète des personnes intersexes et asexuelles de la sphère publique, même combat : des personnes n’entrant pas dans ce schéma bi-sexué n’ont pas leur place dans cette vision étriquée du monde. C’est bien là aussi que se jouent les questions de non-binarité et de transidentité, d’ailleurs.

Parenthèse fermée.

Lorsque je suis arrivée à Lyon, en 1999, les associations LGBT se comptaient, je pense, sur les doigts d’une main. Les gayprides étaient des joyeux fourre-tout et, à part quelques excités, personne ne se demandait qui était ou non légitime pour y participer. Je ne dis pas qu’il n’y avait pas déjà des tensions et que c’était mieux, encore une fois. Mais aujourd’hui, on assiste assez tristement à des guerres de clochers qui virent parfois à un extrémisme qui n’a rien à envier à celui de nos vieux ennemis fachos. S’il est légitime d’avoir plus d’associations permettant à qui le veut de trouver sa place, du soutien, se tirer dans les pattes ne l’est pas définitivement pas.

En 2019, la gaypride de Lyon a dû être annulée à la dernière minute suite aux menaces d’un groupuscule queer extrémiste, alors même que le défilé devait emprunter des quais du Vieux Lyon, bastion de l’extrême-droite s’il en est dans la capitales des Gaules. Curieux symbole. En 2018, à Londres, ce sont des extrémistes lesbiennes qui ont bloqué la manifestation, car elles ne voulaient pas des trans. je ne compte plus, tous les ans, les polémiques sur les organisations des défilés, sur qui doit défiler avec qui dans quel ordre…

Je sais que certains prennent trop de places. Je sais que certains groupes doivent avoir plus de visibilité. Comme femme, pan, non binaire, handicapée, je le sais.

Mais, vraie question, à l’heure où notre monde brûle, où nos droits vacillent, où nos vieux ennemis sont plus que jamais aux portes du pouvoir, combien de temps allons-nous encore rester divisés ? 

Le combat n’est pas fini. Il ne le sera probablement jamais, mais ce n’est pas ça qui est important. L’important, c’est qu’on le lâche rien, qu’on soit toujours là, nous tou(te)s pour tou(te)s, et surtout, surtout, qu’on soit là pour que demain, plus aucun gosse, et on se fout de son drapeau, ne puisse croire qu’il n’a pas le droit d’exister, qu’il n’a pas sa place ici bas.

Alors, si on se remettait ensemble sous une seule bannière pour avancer ensemble ?

En plus, moi je l’aime bien, le drapeau inclusif… ^^

Voili voulou, désolée pour le pavé, j’espère aussi que ce n’est pas trop incohérent ni confus… N’hésitez pas à venir me dire ce que vous pensez de tout ça en comm” ! 🙂

Allez, on se prépare psychologiquement au mois de juin, 30 jour à supporter le pinkwashing et les hétéros qui chougnent que y en a que pour nous et que c’est trop pô juste. ^^

La vie est belle. C’est le printemps.

Prenez soin de vous et à la semaine prochaine pour la suite de Sur les traces d’une louve blanche ! 🙂

 

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